Confession – Czeslaw Milosz

Comme souvent, j'ai acheté ce livre par hasard parce que je l'ai ouvert au milieu et qu'une phrase m'a plu. En l'occurence (de mémoire) : "Tu n'aurais pas envié le ténor au manteau en poil de chameau si tu avais deviné sa peur et su comment il allait mourir." Puis j'ai laissé passer quinze ans. Il y a deux jours, je suis retombé dessus et j'ai lu le premier poème qui m'a enchanté :

Seigneur Dieu, j'ai aimé la confiture de fraise
Et la sombre douceur du corps féminin.
Comme aussi la vodka glacée, les harengs à l'huile,
Les parfums : la canelle et les clous de girofle.
Quel prophète puis-je donc faire ? Pourquoi l'esprit
Aurait à visiter quelqu'un de pareil ? Tant d'autres
À bon droit furent élus, dignes de confiance.
Mais moi, qui me croirait ? Car ils ont vu
Comme je me jette sur la nourriture, vide les verres,
Et regarde avidement le cou de la serveuse.
En défaut et conscient de l'être. Désireux de grandeur,
Sachant la reconnaître où qu'elle soit,
Et pourtant d'une vue pas tout à fait claire,
Je savais ce qui reste pour les moindres comme moi :
Le festin des brefs espoirs, l'assemblée des fiers,
Le tournoi des bossus : la littérature.

-- Czeslaw Milosz, Confession, 1986

Rien d'Autre à Dire (Pas Gai mais Beau)

Bien sûr, vous connaissez ce titre depuis belle lurette. Parce que vous êtes cools, vous.

Mais saviez-vous que Dan Klein, le chanteur de The Frightnrs, est mort de la maladie de Charcot ? Je trouve que ça fait quelque chose d'écouter une chanson en sachant que :

  1. Le chanteur est décédé avant la sortie de son premier l'album,
  2. Il savait qu'il allait mourir au moment d'enregistrer le morceau,
  3. On va tous mourir.

Alors oui : c'est du reggae. Mais du reggae new yorkais, me dit-on.

Et quand vous entendrez s'élever les premiers notes de son chant sinueux et mélancolique*, je pense que, comme moi, vous serez conquis :

Till Then, par The Frightnrs

* I never chose to love so sweet a rose, I suppose I was just made that way. (Je n'ai jamais choisi d'aimer une rose si délicate, je suppose que j'ai simplement été fait comme ça.)

Lumière du Dimanche Soir

Fin du weekend. J'ai un peu de rab, je repars à Paris demain matin.

Quai de Trouville-sur-mer

En plus de l'administration pour ChezFilms, j'ai enfin trouvé la fin de "The Stagemaster", le long métrage en anglais que j'ai fini d'écrire... il y a si longtemps. Au moins cinq ans. J'ai trouvé la fin idoine : celle qui tombe sous le sens et éclaire les personnages d'une lumière neuve, belle et cohérente. De sorte que maintenant, je ne peux pas m'empêcher de répéter "ça ne pouvait pas finir autrement". 

J'ai aussi avancé sur un nouveau projet de moyen métrage qui m'excite beaucoup. Dès que je me ballade dans la rue, je m'y replonge et les scènes viennent toutes seules. À aucun moment je n'ai besoin de réfléchir – ce qui est le principal ennemi des scénaristes, si vous connaissez mes opinions sur le sujet.

J'ai aussi avancé sur "Quand le Gondolier Meurt", mon roman. J'en suis au dernier chapitre et ça progresse de plus en plus lentement à mesure que j'arrive au bout.

Objets Trouvés et Radiations : Kramatorsk

Donc je résume :

En 1980, un immeuble est fini d'être construit à Kramatorsk, Ukraine. L'année suivante, une jeune femme de 18 ans vivant dans l'appartement 85 meurt soudainement. Deux ans plus tard, c'est son frère de 16 ans qui décède. Puis la mère. Malgré ces décès en série – tous de leucémie – les habitant ne sont pas plus inquiets que ça. Les docteurs pensent qu'il s'agit "d'une mauvaise hérédité".

Une nouvelle famille emménage. Cette fois, c'est le fils qui meurt d'une leucémie foudroyante. Le père décide de mener son enquête.

Résultat de l'enquête (tenez-vous bien) :

En 1970, une capsule de cesium extrêmement radioactive faisant partie d'un compteur de rayonnement est égarée dans la carrière de Karansky. Les recherches infructueuses sont abandonnés après une semaine. Les pierres extraites de la carrière sont utilisées pour la construction du bâtiment 7 rue Mariyi Pryimachenk. La capsule radioactive se retrouve dans le mur séparant l'appartement 85 et 52, juste à côté du lit des enfants.

Quatre morts, dix-sept irradiés.

Pourquoi je parle de ça ? Parce qu'une capsule radioactive vient d'être perdue sur une route quelque part en Australie. Si vous passez par là...

Encore un Dessin de Confinement

Ça devient une habitude : quand je n'ai pas le temps, je poste un vieux dessin fait pendant le confinement. Sauf que là, c'est aussi le sujet. Et ce n'est pas vraiment un dessin. Mais bon.

Pourquoi Faire Vite ?

Je passe tellement de temps à écrire sur ordinateur (roman, scénario, journal, email, etc.) que j'ai récemment commencé à m'entraîner à taper au clavier. Chaque mot-par-minute gagné me sera repayé au centuple – voilà mon plan diabolique.

Au cours d'une de ces sessions dactylographiques, je me suis rendu compte du phénomène suivant : j'obtiens de bien meilleurs scores quand je n'essaie pas d'aller vite. 

Plus exactement : quand je me concentre uniquement sur la précision (faire zéro faute en allant aussi lentement que nécessaire), je deviens à la fois plus rapide (en nombre de mots par minute) et plus précis (en nombre d'erreurs par phrase). Autrement dit : je tape plus vite quand je pends mon temps. 

D'où ma question : dans combien de domaines suis-je inefficient (ou tout simplement mauvais) parce que j'essaye d'aller trop vite ?

D'ailleurs, pourquoi aller vite ?

Il semble qu'on n'y puisse rien : c'est un réflexe conditionné. Dès qu'on maîtrise les bases d'une activité, l'étape suivante est de vouloir augmenter la cadence. Trouver la technique, l'astuce, le gadget qui permettra d'aller plus vite pour améliorer le rendement. Ne surtout pas perdre son temps.

On voit ça partout. À l'école, les meilleurs élèves sont ceux qui brillent en temps limité. En sport, la médaille est attribuée au plus véloce. Au travail, le premier arrivé remporte le marché ou la promotion. C'est tellement entré dans les moeurs qu'on n'y pense même plus.

Mais récemment, j'organise la resistance.

En y réfléchissant un peu, on réalise qu'il existe de nombreuses activité où la vitesse n'est pas aussi nécessaire qu'on imagine. Grosso modo, à moins d'être urgentiste, pompier ou sprinter, on a pris l'habitude d'aller trop vite en tout.

Donc la prochaine fois que travaillerez, que vous marcherez ou que vous ferez le ménage, posez-vous cette question magique : "Pourrais-je faire cette activité beaucoup, beaucoup plus lentement ?".

Cette façon de voir les choses a transformé mon quotidien.

L'idée que je pourrais accomplir une tâche "à mon rythme" sans considération de vitesse ou d'efficacité me rend toute activité beaucoup plus sympathique. Je procrastine moins. Je suis moins anxieux dans le travail. Je considère sans appréhension des actions que je n'aurais jamais songé entreprendre auparavant. Et quand je remarque un stress latent, je peux souvent le relier à une pression de rendement sous-jacente.

Mais surtout, cette philosophie a un autre avantage auquel je ne m'attendais pas : ralentir m'a rendu beaucoup, beaucoup plus rapide en tout.

* Pour ceux que ça intéresse, ma routine pour taper au clavier : je commence par keybr où mon objectif est de faire un zéro faute avec majuscule et ponctuation activées. Une fois réussi, je passe à monkeytype où je dois avoir plus de 96% de précision (français 2K avec majuscules et guillemets). Enfin, 10fastfingers pour aller le plus vite possible toujours en restant au-dessus des 96%.

Le Meilleur Épisode de ma Série Préférée

Pour sortir un peu de Six pieds sous terre, The Wire, Mad Men ou The West Wing, il y a une série que j'avais découverte par hasard et qui m'avait épaté. Je l'ai regardée à nouveau cette semaine et elle m'a à nouveau transporté. Mais surtout, l'épisode 8 – ce que les scénaristes appellent le "turning point", où le(s) protagoniste(s) décide(nt) d'affronter leur destin – m'avait fait un effet boeuf. Ça n'a pas re-loupé.

La série est Halt and Catch Fire et l'épisode en question s'appelle "The 214's".

C'est agréable de voir une série pensée de A à Z. On n'a pas l'impression que les auteurs se piègent eux-même et doivent sans cesse justifier des bêtises inventées précédemment. Les personnages sont tenus. Ça va quelque part. Ça raconte quelque chose.

Dans ce huitième épisode, après les revers dramatiques qu'on attend avant le climax, les trois personnages principaux prennent la décision de sauter le pas et se jeter dans le vide. Sauf qu'ici, ce n'est pas l'exercice d'écriture mille fois vu. J'y ai cru. J'étais avec eux. Tout ce qui s'était produit précédemment a soudain pris sens et m'a donné envie de prendre la route avec eux pour aller au Comdex.

Et le générique, pour les amateurs, était quelque chose.

Impossible de trouver les saisons suivantes en VO. Et j'ai peut-être un peu peur d'être déçu. Mais si vous avez des pistes...

Concept Art "Ma Vie Sur Mars"

Concept art pour un court métrage d'animation que j'ai fini d'écrire il y a longtemps mais que je n'ai jamais fait avancer. La prochaine étape aurait été d'envoyer le scénario à des sociétés de production.

"My Life on Mars"

Première phrase du film (voix off) :

Quand la technologie fut suffisamment avancée pour atteindre Mars, tous les gouvernements de la planète se demandèrent :
– Qui allons-nous envoyer ?
– Je sais, a dit quelqu'un ! Et si on envoyait un enfant ?
Et tout le monde a trouvé que c'était une idée formidable.
Mais si vous voulez mon avis : c'était une idée à la noix.

Trois Règles de Vie pour Changer le Monde

Changer le monde, peut-être pas. Mais déjà, vous arrêterez de me casser les pieds.

1. Plus de "bon appétit" à tout bout de champ

À table, avec votre famille, avec vos amis : éclatez-vous.

Même si le manuel de Nadine de Rothschild dit que ça ne se fait pas (quelle est la prochaine étape : "bonne graille ?" faisait remarquer un convive), ça fait partie de la culture française, de votre liberté d'expression et sinon, comment briser la glace avec tous ces gens auxquels on a rien à dire ?

En revanche, quand vous voyez, assis sur un banc public ou à une terrasse, quelqu'un que vous ne connaissez ni d'Ève ni d'Adam, que vous ne recroiserez jamais de votre vie, et qui est en train prendre la première bouchée de son sandwich en lisant le journal... Pourquoi l'emmerder ?

C'est vrai : c'est toujours agréable de connecter avec un autre être humain.

Mais à part l'obliger à avaler de travers pour répondre un "merci" sans conviction et disparaître à jamais de sa vie, qu'avez-vous accompli ? Qu'avez-vous tiré de cette interaction ? Pourquoi cet entrain dans la voix et ce petit sourire satisfait en repartant rue d'Amsterdam ? (Les intéressés se reconnaîtront.)

2. Plus de croissant inutile

Si vous êtes serveur et que je vous demande un café, inutile de me proposer "Et vous ne voulez pas un petit croissant avec ça ?".

Non. Je ne veux rien. Remballe ta camelote.

Si j'avais voulu quelque chose, j'aurais prononcé les mots correspondants. J'aurais articulé "avec un croissant" ou j'aurais demandé "une formule petit déjeuner". Je n'ai besoin d'aucune assistance dans l'appréciation de mes désirs ni la formulation de mes envies.

Alors je sais : c'est probablement votre patron qui l'exige. Mais laissez-moi partager un secret avec vous : rien ne vous oblige à suivre des ordres débiles quand votre patron ne se tient pas juste derrière vous. Et je refuse de croire qu'il se repasse les enregistrements de surveillance en lisant sur vos lèvres pour vérifier que vous suggérez les bonnes pâtisseries. (Si c'est le cas, foutez le camp.)

C'est quoi la prochaine étape ? Commander un verre d'eau pour entendre le serveur vous glisser à l'oreille "vous n'iriez pas faire un petit pipi avant ?". Au moins, je trouverais ça drôle.

3. Commencez maintenant

Terminons sur du positif.

Qu'il s'agisse de méditation, d'exercice physique ou de recherche d'un sens à votre vie, commencez maintenant. Mettez-vous y aujourd'hui. Tout de suite. Ne finissez même pas ce paragraphe. Allez-y.

Surtout, n'attendez pas "d'avoir fini tel projet" ou "d'être dans de meilleures dispositions". 

Il y a deux raisons de ne pas attendre :

  1. Sans équilibre, votre projet va sûrement dans la mauvaise direction et son accomplissement ne fera que vous enfoncer davantage. Quant aux meilleures dispositions, elles ne viendront que si vous faites ce qu'il faut. Commencez.
  2. Si vous repoussez ce qui améliore votre vie à plus tard, "quand vous aurez le temps", vos bonnes résolutions disparaîtront en même temps que votre temps libre. Or, c'est là que vous en avez le plus besoin.

Par exemple : je médite et j'écris mon journal chaque matin. Parfois, je saute un jour ou deux – ça arrive. Mais jamais – ô grand jamais ! – quand j'ai une journée importante ou chargée. Au contraire : c'est là que ça compte et que j'ai besoin de toute mon énergie mentale.

Les lendemains de cuite où je mange du gras en regardant Netflix, c'est moins grave.

Sites web, Wordpress, Drupal : Comment Faire aussi Mal que Moi

Un mot rapide sur comment je fais mes sites internet parce que ma méthode est :

  • Extrêmement lente,
  • Très fastidieuse,
  • Pas du tout sécurisée,
  • Impossible à partager / mettre à l'échelle,
  • Une énorme perte de temps dans ma vie.

Si vous voulez faire la même chose, voici comment.

À la préhistoire, je faisais des sites statiques en HTML / CSS. Et c'était drôle. J'avais appris le html au cours d'un stage dans une boîte internet et je prenais beaucoup de plaisir à faire des sites psychédéliques où tout bougeait grâce à des gifs (maintenant je prononce "jguif" pour mettre tout le monde d'accord) soigneusement placés.

J'aurais dû m'arrêter là.

Puis je me suis mis à Wordpress. Et soyons clair : c'est très bien, Wordpress. Un environnement très mature, une base de code solide, une communauté très active autour d'un schéma open source avec des possibilités payantes pour ceux qui veulent. Quelque soit votre business, dans 90% des cas, Wordpress est une bonne solution.

J'aurais dû m'arrêter là.

Mais quand est venu le moment de faire un site web pour ma société ChezFilms, je voulais davantage de contrôle. Sur l'esthétique, les catégories, la navigation. J'ai commencé par un site statique en html : simple, sobre, rapide. Les infos importantes sur la société, des films de démonstration, une adresse email et puis c'est marre.

Et c'est là que j'ai déconné. J'ai mis le doigt dans l'engrenage.

Je me suis dit : "si je créais quand même une toute petite base de données pour rentrer mes films" ? Après tout, avec plus de 60 films à mon actif, ça avait du sens de pouvoir naviguer les projets par client, par métier, par genre, etc. J'ai donc relié mon site à cette base en php.

Mais pour remplir cette base et la mettre à jour, il fallait bien une console d'administration. Donc j'ai programmé ça, toujours en php : une façon rapide et adaptée de rentrer les films, les équipes, les projets. La version 1 ne concernait que les films. Pour la version 2, j'ai étendu aux autres types de posts : photos, articles, vidéos, etc.

Et avant que je m'en rende compte, j'avais programmé un nouveau Wordpress.

En beaucoup, beaucoup, beaucoup moins bien, évidemment. Mais – je dois l'admettre – très adapté à mes besoins. De sorte que si vous allez sur ChezFilms, c'est encore mon code qui fait tourner le site. (La seule librairie externe que j'utilise est twig.) La console permet aussi de gérer factures et devis.

Puis... J'en ai eu marre. Depuis le début de l'année, comme vous le savez, je mène une approche davantage centrée sur le contenu que le contenant.

J'ai donc tout repris à zéro en utilisant Drupal.

C'est un framework qui permet de construire un site de A à Z mais plus en profondeur que Wordpress. L'architecture est extrêmement modulable de sorte qu'on peut faire ce qu'on veut avec un minimum de code. Et il existe des templates tout faits. C'est avec ça que j'ai créé cette version de la Boulengerie et que je vais créer la prochaine version de ChezFilms.

Et après, c'est promis : on s'arrêtera là.