Pour ceux qui suivent

Théâtre Le Pic, 20h04

Maintenant que j'ai commencé ça, je me sens obligé de continuer à écrire des conneries.

Ça ne durera pas longtemps.

C'est peut-être déjà fini. Dernières lignes avant la chute.

J'ai écrit beaucoup cet été pourtant. Je me suis remis à écrire dans des carnets avec un stylo plume, comme un adulte. Et je continue le journal sur ordinateur aussi. Et oui : c'était très intéressant. Tout était vraiment très intéressant. J'ai écrit des pages et des pages et des pages et il n'y a rien à jeter. RIEN. C'était parfait, accompli, final.

Mais ici, rien. J'avais autre chose à foutre et vous aussi.

Et là... J'ai rien à dire, honnêtement. Un peu comme si vous étiez ma femme et que j'avais passé tout l'été (et toute la matinée) avec ma maîtresse : la libido n'est plus ce qu'elle était ; on est sur de la fin du tube.

Peut-être une chose : je suis assis sur le bord en pierre du théâtre Le Pic et ça pue la pisse. J'adore cette petite place mais j'ai mal choisi mon endroit. Et maintenant que j'ai sorti l'iPad, que je l'ai posé sur les genoux, que je l'ai connecté au téléphone, j'ai plus envie de me lever.

Bon, si, quand même. Ça pue trop.

Voilà.

Bien sûr, je peux être en train de mentir. Peut-être que j'écris ça dans le train ou à mon bureau et que je vous mène en bateau. AHA ! Je vous ai bien eu, non ? Bien sûr, d'aucuns se poseront la question "pourquoi" ? Pourquoi mentir ? C'est une très bonne questions. Je ne mens pas. Je suis là où je dis.

Ces ligne sont-elles aussi mornes à lire qu'à écrire ? Je n'y prends aucun plaisir. On ne réfléchit à rien, tout est circonstanciel, sans suite, sans enjeu. Du pipi de chien, ici comme là-bas.

Mais il faut passer par là. Vous voyez comment, subtilement, je suis passé de métaphores scatophiles lors des premiers posts à des considérations d'avantage urinatoires ici. On reste proche du pot. Mais c'est de là qu'il faut partir. Rien ne sert de s'élever artificiellement. Il n'y a qu'une seule réalité, comme on a vu.

Et je me rends compte que j'essaie de faire de la quantité. J'essaie d'atteindre une certaine longueur de texte, ce qui est débile. En même temps, c'est un "flot", donc vous étiez prévenu.

Ce qui est drôle c'est que, comme je vous ai dit – c'était ironique mais le fond était vrai – j'ai écrit de très jolies choses dernièrement. Genre : des petits poèmes de cinq ou six lignes assez rigolos, assez piquants, pas prétentieux, mais qui laissent une marque. Sortis d'une traite, ou presque. Et quelques réflexions sur la vie très forte. Genre des choses qui me tournent dans la tête depuis des mois, peut-être des années, et que j'ai enfin réussi à mettre en mot de façon extrêmement concise, claire et d'une traite également. 

Mais je ne vais rien partager de tout ça ici.

C'est pas le lieu. 

Et c'est vrai que c'est un peu chiant d'avoir autant de lieux. Ici, le blog, mon journal, mes carnets, facebook, instagram, les scénarios, le mur des chiottes. On aimerait tout écrire au bon endroit, systématiser le processus, mais ce n'est pas souhaitable. Chaque chose a une place où elle sera mieux.

Ce qui me fait penser : systématiser, mécaniser est toujours une erreur.

On cherche le bon processus, la bonne façon de faire, celle qui va nous permettre d'éteindre une partie du cerveau afin de créer le reste en mode automatique. Avancer. Mais ça ne marche jamais. Ou ça ne produit rien d'intéressant. C'est le chaos qui crée. Quand rien n'est à sa place, que rien n'est prêt, qu'on est encore au milieu de la première répétition et qu'on nous dit "en fait, on va tourner celle-là et il n'y aura qu'une seule prise".

D'ailleurs, je m'interdis de refaire les choses au propre désormais. C'est une aberration. On fait, c'est tout. Et on passe à autre chose.

 

Respirez, vous êtes filmé !

17h30, Café Chez Willy, Trouville

Du coup j’écris plus rien dans le blog maintenant que je laisse libre cours à mes diarrhées verbales ici. Mais bon, c’est l’été. Un peu comme les séries pourries qui remplacent les programmes habituels dans les journaux. On s’en fout, tout le monde est à la plage. Personne n’a envie de lire de la philosophie avec le soleil dans les yeux et du sable dans le slip.

Mais justement : parlons philo.

Je repense beaucoup au souffle en ce moment, à la respiration. Pour trois raisons. (Si je m’arrête avant trois, rappelez-moi, c’est que je me suis perdu en chemin.)

D’abord, si tout va bien, je vais réaliser un clip en septembre pour retropico. (Ça, pour le coup, j’en parle dans le blog). Et ça va surprendre beaucoup de monde parce que je ne suis pas un grand fan de ballet et j’ai jamais fait de danse mais… j’ai des fantasmes de chorégraphies. Depuis toujours. J’ai toujours eu envie de tourner des scènes ou faire clips dans lesquels j’aurais pu inventer une chorégraphie avec une danseuse.

Du coup, ce clip, c’était l’occasion. Alors on a commencé a répéter avec la fille d’une amie qui est chanteuse et danseuse et qui jouera le rôle principal. On prend des petits gestes du quotidien (boire du thé, se rattraper dans le métro, croiser les jambes) et on les « enchaîne » pour créer une danse.

Or, on s’est aperçu de la chose suivante : à chaque geste, il était presque évident d’associer soit une inspiration, soit une expiration. Genre, c’est évident ; tout le monde serait d’accord. Et sur la dizaine de gestes qu’on a inventés (c’était juste un test, a « proof of concept » si vous voulez), il se trouve qu’environ la moitié étaient des inspirations et l’autre des expirations.

Au début, on essayait d’enchaîner les gestes un peu par hasard, ou par sens. Mais quand on a décidé d’alterner le souffle, c’est tout de suite devenu magique. Je me souviens de la première tentative : immédiatement, ça marchait, ça coulait, c’était plus facile à faire et plus agréable à voir. À un moment, on était bloqué et on s’est dit « c’est pas grave, il y aura deux expirations de suite »… Mais ça ne marchait pas du tout. Et quand on a trouvé l’inspiration à remettre entre les deux, c’est redevenu beau.

En parallèle, comme j’en déjà ai parlé, je suis en train de lire Osho.

Et justement, la première technique qu’il donne – la plus connue – est sur le souffle.

C’est un peu comme ça que j’avais commencé la méditation à l’époque – c’est comme ça que tout le monde commence : on se concentre sur le souffle et on remarque que des pensées viennent nous assaillir (dont on n’est pas responsable puisque, soi, on veut se concentrer sur le souffle). C’est la première fois qu’on remarque qu’on n’est pas maître de ses pensées et qu’elles nous arrivent, comme arrive la pluie.

Après, j’avais laissé tomber. Ou j’avais évolué. Je me concentrais sur l’ensemble des manifestation intérieures et extérieures : les sensations corporelles, les sons, les émotions, les angoisses, etc. Le souffle n’était qu’un parmi d’autre.

Mais en relisant Osho, je m’y suis remis. Et j’ai réalisé à quel point c’était difficile. À quel point avoir conscience uniquement du souffle demandait un effort de concentration hors d’atteinte. C’est parce qu’en réalité, c’est impossible. La seule chose qu’on peut faire, c’est accepter les autres manifestations pour revenir au souffle. Sinon, on crée les deux réalités parallèles dont j’ai parlé dans la tartine précédente.

Bref, on s’en fout. Mais j’en suis là.

(D’ailleurs ça me fait penser à cette chose intéressante que je n’avais jamais remarquée : Osho dit qu’arrêter la respiration arrête la pensée. Ça m’a bien faire rire. « Le tienne peut-être mais moi non ». Puis j’ai essayé et… Oui. En tous cas, moi, sans entraînement, j’ai découvert que c’était très difficile d’avoir une nouvelle pensée – ie : pas seulement réciter quelque chose – en apnée. Mais j’imagine qu’en apnée longue, c’est autre chose. Sûrement qu’on s’habitue.)

Ce qui nous amène à la troisième raison.

J’essaie de faire trente minutes de rameur tous les jours. J’en ai déjà brièvement parlé. Or, puisque j’étais là-dedans, je me suis dit, alors que j’étais en train de ramer : « est-ce que je pourrais me concentrer sur le souffle ? ». (J’avais oublié mes écouteurs, je m’emmerdais un peu.) J’ai essayé. Et la j’ai découvert que ma respiration faisait n’importe quoi. Je ne commençais jamais à inspirer au même moment, je soufflais souvent à peu près au même endroit mais c’était toujours chaotique. Et il y avait plein de moments où je bloquais carrément la respiration. Pas longtemps, mais quand même.

Alors je me suis posé la même question que pour la chorégraphie : y aurait-il un souffle naturel adapté au geste ? Et oui, très vite je l’ai trouvé. On souffle doucement en poussant sur les jambes, plus fort quand on tire sur les bras, puis on laisse l’air rentrer quand on revient. Et une fois que j’ai fait ça, tout est devenu beaucoup, beaucoup plus simple. Toutes les autres choses que j’essayais de mettre en place (tenir le dos droit, relâcher les bras sur le retour, ne pas trop pousser sur les talons, etc) est venu beaucoup plus naturellement.

Du coup, aujourd’hui, je me suis remis à observer ma respiration. À me demander s’il existe un souffle naturel pour ce que je suis en train de faire. Quand je marche. Quand je suis avec des gens. Quand j’écris. Et à plusieurs reprises, ça m’a débloqué. J’ai senti qu’une tension se défaisait immédiatement.

Je sais, je redécouvre l’Amérique. Toutes les techniques de relaxation sont basées sur le souffle. Mais à chaque fois, j’ai l’impression de redécouvrir l’Amérique avec mon propre bateau, vous comprenez la différence ? Je tombe sur des vérités universelles en menant mes propres expériences et j’ai l’impression que ça change tout.

PS: Un papi vient de poser sa canne sur la table. En chemin vers les toilettes, il a dit à mes voisins «Vous pouvez surveiller ma canne, hein ? Parce qu’on vit une telle époque ! ». Du coup, j’ai vraiment envie d’aller la prendre. Genre, je paye mon café, je me lève, et je la prends avec moi. Je suis pas sûr que les voisins feront quelque chose.

PS2 : Non, hein, je vais pas le faire.

PS3: OH PUTAIN JE L’AI FAIT ! L’un des voisins m’a couru après en rigolant puis quand il a vu que je ne m’arrêtais pas, on a failli en venir aux mains.

PS4: Mais non. Vous savez bien que je suis fade et que ma vie est chiante. Et puis maintenant le papi est revenu.

PS5: Quelle est la bonne respiration pour voler la canne d’un vieux ?

Retours de panique

Trouville, maison, 22h14

« Panique dans l’Espace », la websérie que j’ai tournée il y a – oh là là – trois ans et que je suis toujours en train de post-produire (je viens de sortir l’épisode 6), est sûrement ma première œuvre de beatnik. 

Par là je veux dire que c’est la première oeuvre que j’ai créée une fois que tout mon trip « je médite tous les jours et je deviens un putain de hippie » avait réellement commencé à me transformer. Ça faisait environ trois ans que je méditais.

Je me souviens, à l’époque, je commençais à accepter de ne rien faire. Je commençais à accepter de rester désoeuvré pendant de longues périodes. Bien sûr, je ressentais de la culpabilité – et ça m’arrive toujours – mais je sentais aussi que les actions qui allaient s’enclencher si j’écoutais ma culpabilité n’étaient pas les bonnes. Que ça allait rassurer temporairement (ouf, je fais quelque chose, on ne peut plus m’accuser d’être un tire-au-flanc) mais que finalement, je n’arrêtais pas de « faire des choses » depuis des années et je n’étais pas sûr que ça m’amenait là où je voulais.

C’est la première fois où, pendant un temps, j’ai décidé de tout arrêter. C’est pas vrai : je l’avais déjà fait pendant le confinement – grosse grosse période de méditation pour moi – mais à l’époque, tout le monde était à l’arrêt donc c’était facile. S’arrêter quand tout le monde est en mouvement, c’est ça qui est dur.

Et très vite, j’ai réalisé que quand on arrêtait d’agir par culpabilité, par habitude, par peur d’être jugé, après un moment, venait autre chose. Des choses qu’on a vraiment envie de faire. Avec lesquelles on est réellement alignées. Un peu comme des petits animaux qui ne viennent manger dans votre main que lorsque vous êtes parfaitement immobile. Le moindre geste déplacé ou trop brusque et hop ! Tout le monde s’en va.

Et donc Panique (c’est comme ça que j’appelle la série quand je suis tout seul) est la première chose que j’ai écrite… librement, disons. Les personnages et les blagues me venaient naturellement quand je parvenais à rester oisif assez longtemps. (Et à l’époque, bien sûr, je n’avais pas prévu que ça deviendrait quoique ce soit.)

L’alignement a continué. Je l’ai écrit en quelques semaines. Le tournage s’est très bien passé, avec des gens formidables. On était très peu donc il fallait tout faire : répéter, tourner, faire à manger, aller chercher les comédiens à la gare. Pourtant, rarement je me suis senti autant à ma place.

« C’est ça que je veux faire » me suis-je dit à plusieurs reprises.

Les retours sur les premiers épisodes ont été… pas mauvais. Mais pas exceptionnels non plus. Les gens trouvaient ça pas mal mais peut-être un peu long. J’étais un peu déçu. Mais… Pas tant que ça, finalement. Beaucoup moins que j’aurais pu l’être par le passé, pour d’autres projets.

Puis les retours se sont améliorés. À mesure que les gens voyaient les nouveaux épisodes, qu’ils comprenaient où ça allait, ils commençaient à apprécier davantage. Et surtout, les gens adorent des épisodes différents. Je pensais que certains feraient l’unanimité mais à chaque fois je trouve quelqu’un pour préférer tel ou tel épisode pour telle ou telle raison que je n’imaginais pas. Et dans ce cas-là, les gens semblent vraiment touchés, comme si ça parlait d’eux. Ce qui me plait, bien sûr.

Depuis, j’ai perfectionné l’art de l’oisiveté. J’y ai beaucoup réfléchi, j’ai beaucoup lu sur le sujet et j’en ai fait le centre de ma vie. Ne vous méprenez pas : je suis plus occupé qu’avant. Je me lève plus tôt, je fais du sport tous les jours, j’ai fini un roman, un cours sur la parole en public, un scénario de long, des films… Vu de l’extérieur, je fais beaucoup plus de choses. Mais vu de l’intérieur, il s’agit d’une série de « gestes » qui s’enchaînent naturellement et dont aucun ne semble jamais obligatoire. Tout est simple. Tout avance.

Et tout vient de ce même élan où, un matin, j’ai dit « j’arrête tout ».

 

 

Le temps, le temps, le temps

Café Trouville, 10h15

Non, je n’obsède pas sur le temps.

Ça fait deux fois que je fais remarquer que « j’ai écrit ça en 15 minutes ». C’est pas pour crâner. C’est parce que je suis un peu estomaqué d’avoir eu besoin de 15 ans pour écrire 100 pages. Et je suis très content de l’avoir fait, hein, mais je me dis que c’est pas très tenable comme rythme.

Alors je regarde si je pourrais pas trouver une façon d’écrire plus vite.

Et publier des tartines ici, c’est une façon de me confronter à ça.

Parce qu’écrire dans le journal, c’est bien, mais c’est pas la même chose. Personne ne lit. Alors qu’écrire du caca sur lequel les gens peuvent tomber, c’est autre chose.

Pas du caca, d’ailleurs. Je ne trouve pas que ce que j’écris ici soit si mauvais. Ni particulièrement bon. Mais c’est ce que je veux explorer : écrire plus vite des choses que je partage.

Déjà, le blog m’a beaucoup aidé dans ce sens. C’est encore des choses que je mets un peu de temps à écrire (ça reste quand même raisonnable) mais ce sont réelleement des élans, pour la plupart. J’écris sur ce qui me tracasse à l’instant t.

Et c’est incroyable comme ça change tout.

Écrire ce qui vient quand ça vient a quelque chose de très naturel, très facile.

Dès que je lutte un peu, c’est que j’essaie d’écrire quelque chose… d’intellectuel. De prévu. De programmé. Mais quand je me contente d’ouvrir les vannes, tout sort comme un… flot.

C’est ce que disait la nana dans cette vidéo que j’aimais bien : laisser le portail ouvert. Ne pas chercher à faire bien ou mal parce qu’en réalité, on ne sait pas ce qui va en sortir. Notre unique rôle est de laisser le portail de la créativité ouvert pour qu’il en sorte quelque chose.

Oh là là, il y a une vieille qui parle à tue-tête à côté. « Ils sont bons les croissants ? Ils sont bons les croissants ? » Ça fait, sans exagérer, 8 ou 10 fois qu’elle pose la question à plein volume. Elle veut montrer qu’elle sait parler italien au vieil Italien à côté alors elle répète les propos les plus insipides en gueulant.

L’italien en question a eu une conversation à plein volume sur son téléphone en mode haut parleur.

Mon fils aussi, est très sensible au son. (Il a bientôt trois ans.) Il paraît que c’est assez courant. Il n’avait pas pu assister au spectacle de danse de sa maman à cause de la musique du théâtre. Il a commencé par se boucher les oreilles mais on a dû sortir. Il était triste. « On retournera voir maman quand il y aura moins de bruit ». Oui, oui, je lui ai dit.

Moi aussi, qui travaille beaucoup dans les cafés, j’évite ceux avec la musique. Ou alors, par de variété française, s’il-vous-plaît. Claude François au réveil, ça va aller, merci.

Allez, au sport.

Stylo Plume

Maison Trouville, 23h01

Rien à dire de particulier mais ce n'est pas un flot si je n'écris pas de temps en temps.

Cela dit j'ai beaucoup écrit dans mon journal au cours des trois derniers jours. Ça réfléchit dur, sur plein de trucs.

Aussi, nouveauté : je me mets de plus en plus à écrire et à dessiner dans des carnets. Depuis que je me suis remis au stylo plume (j'ai découvert les Lamy Safari), il y a plein de fois où je n'ai plus envie d'écrire de façon linéaire sur l'ordinateur mais de... comment dire... placer des mots dans l'espace. Avec des flèches et des dessins. De tout mélanger.

Et je l'impression que ça débloque des choses aussi.

Attention : le journal reste ma principale activité. C'est là que je pose des mots sur les choses importantes et que j'ai vraiment l'impression d'avancer. Mais... Je sais pas. Parfois il y a des idées qui n'ont pas besoin de longues phrases. Juste deux ou trois mots savamment placés sur la page qui créent une tension ou quelque chose. Et ça n'aurait pas de sens de les taper. Un peu comme les listes que j'avais partagées dans ce post.

Sachant qu'en plus ça m'avait toujours emmerdé les gens qui disent "moi, j'écris toujours au stylo, j'ai besoin du contact avec le paper gna gna gna". Je m'en fous du contact avec le papier. Il me fait chier le papier. C'est un arbre crevé pour rien. C'est le rappot à l'epace qui m'intéresse. Le fait de ne pas mettre les mots à la queue leu leu, bêtement, comme s'ils attendaient dans la file pour les toilettes.

D'ailleurs, tous les trucs importants – les romans, les scénarios, les articles – je les écris sur ordinateur.

J'ai besoin de voir à quoi ça va ressembler à la fin.

D'ailleurs, j'ai un système pour écrire qui m'aide beaucoup à prendre du récul.

J'écris sur un petit programme qui s'appelle "Vim", dans le Terminal (si vous ne savez pas ce qu'est le Terminal, je ne vais pas vous l'expliquer maintenant) et qui est normalement utilisé par les codeurs. C'est un programme extrêmement spartiate où j'écris en blanc sur fond noir. Aucune mise en forme, rien.

En revanche, j'appuie sur une combinaison de touches et BOUM ! Apparaît le roman dans une forme presque imprimée. Ou BOUM ! Apparaît le scénario formaté comme il faut.

Et ça m'aide beaucoup, cet aller-retour. Ça m'aide à prendre du recul. J'écris dans un environnement où la forme ne compte pas puis, quand j'ai fini, je regarde ce que le lecteur verra (ou en tous cas une version très proche). Et ne pas voir dans le même environnement où on écrit, ça permet un peu de se laver les yeux.

Parce que, soyons honnête : tout est dans le recul.

Il faut dormir sur les choses.

C'est ça, la seule arme de l'auteur et de l'écrivain.

Si vous lisiez mes premiers jets de quoique ce soit, vous penseriez qu'ils sont écrits par un enfant de cinquième avec de gros problèmes personnels. Mais quand je viens de l'écrire, je ne m'en rends pas compte. Je trouve ça génial. C'est le lendemain que je me rends compte à quel point c'est pourri. Alors je reprends, je corrige.

L'écriture pour moi, c'est vraiment comme de la sculpture.

On jette de la matière en vrac là où on sait qu'il faut quelque chose. Mais au début, c'est informe. Puis on repasse dessus, on repasse dessus, on repasse dessus... On essaie de poursuivre dans les nouvelles phrases le mouvement qu'on avait créé dans les phrases et les pages précédentes. Comme un sculpteur qui poursuit la trajectoire du muscle dans la masse qui deviendra bientôt le pied. Après, il faudra encore dessiner tous les orteils...

Il est 23h16. J'ai pondu ça en quinze minutes. Et vous savez quoi ? Comme promis, je ne relis même pas. Dites-moi si vous voyez des fautes.

Pas content

Hôtel Julia, Paris, 17h52

Pas du tout content de mon flot de ce matin.

Je me suis empêtré dans les explications.

Non pas que je ne sois pas d'accord avec ce que je dis – je le suis, à peu près, même si je trouve que je le dis mal – mais à un moment... je me suis mis à vouloir expliquer, vous comprenez ? À un moment, j'ai remplacé l'acte d'écrire ce que j'ai dans la tête à l'instant t par l'acte d'expliquer quelque chose coûte que coûte. Ce n'était plus du flot. C'était... une explication.

D'ailleurs, j'ai mis plus de temps à l'écrire.

Je me suis fait chier à donner du contexte, tout ça. Sauf que le contexte, c'est du bla bla. C'est bien quand on écrit une note de blog ou un article. Mais ça n'a rien à foutre dans le flot.

Le flot est le flot.

Bordel de merde.

Mais c'est bien : maintenant je sais quoi éviter.

D'ailleurs, c'est quelque chose que j'essaie d'éviter dans la vie aussi.

J'essaie de ne rien faire de ce qui est prévu.

Je fais ce qui vient au moment où ça vient.

Mais alors comment faire le ménage ou les parties de mon boulot qui m'emmerdent ?

C'est ça le plus drôle : je les fais quand même. Naturellement. Quand ça vient. Et bizarrement, tant que je ne me force pas, ça vient toujours.

Et si ça ne vient jamais, c'est que ça n'est pas si important.

Osho et le présent

Café La Piscine, Paris, 11h

Je vous avais dit que ça durerait deux jours.

J'ai publié le premier post dans un élan de colère (j'exagère). J'ai écrit le deuxième dans le foulée – mais je ne l'ai pas publié tout de suite. Puis je suis parti à la montagne avec mon fils.

Ce matin, j'ai repris mon journal – je n'ai pas toujours le temps quand je suis en famille – et je me suis posé la question : est-ce que je publie ? Réponse : non. Rien de très personnel, ce n'est pas ça. C'est juste que, naturellement, sans y penser, j'ai commencé à taper sur Obsidian (là où je prends mes notes et écris mon journal). Puis naturellement, sans y penser, je me suis dit que je pourrais mettre quelques mots ici.

Pour entretenir le flot.

Que dire ? 

Je suis en train de lire Osho. Oui, le guru de "Wild Wild Country".

Parce que j'avais entendu plusieurs personnes que j'aime bien dire qu'il était beaucoup plus pertinent qu'on pensait, que ces écrits étaient vraiment clairs et forts. Donc j'ai commencé à lire Le Livre des Secrets (oui, titre New Age un peu pourri) et c'est vrai que c'est très, très fort. Très très clair.

Mais ça va être compliqué d'en parler ici.

Pour ceux qui n'ont pas suivi, depuis environ 5-6 ans, je suis devenu un beatnik. Je médite tous les matins, je m'intéresse à l'hindouisme, au Zen et à toutes ces conneries. Je lis beaucoup là-dessus. En vrai, à part un peu de fiction ici et là, je lis exclusivement là-dessus.

Et c'est dur d'en parler parce que si je plonge tout de suite dans ce qui m'intéresse en ce moment, sans vous expliquer un bout du chemin que j'ai fait pour en arrive là, ça va sembler très... abstrait. Très New Age. Très déconnecté de tout.

Mais aussi : j'ai vraiment autre chose à foutre que de vous expliquer tout depuis le début. Si vous voulez avoir une idée, vous pouvez lire mes posts taggés #zen par ordre chronologique mais même ça, ça ne vous renseignera que très partiellement. Et si j'attends que tout le monde soit à jour pour avancer, je n'écrirai jamais rien ici.

Donc fuck it. Vous comprendrez rien. Tans pis.

J'ai découvert deux idées très fortes dans le début du livre d'Osho.

D'abord, ça a conforté quelque chose que j'avais commencé à comprendre depuis plusieurs mois, à savoir qu'il n'y a qu'une seule réalité.

Ça paraît évident. Pourtant, si vous êtes honnête avec vous-même et avec ce qui se passe dans votre tête, vous savez bien que vous suivez plusieurs fils en même temps. Il y a "la réalité telle que j'aimerais qu'elle soit" (vos désirs, vos attachements), "la réalité telle que je la perçois" (votre interprétation très personnelle de ce qui passe) et, de temps en temps, la réalité telle qu'elle est (lorsque vous vous cognez le petit orteil, par exemple). Et on n'a de cesse de sauter d'un fil à l'autre.

Quand on est en colère par exemple, ou en proie à toute autre émotion qu'on ne veut pas, on entretient deux fils de réalité parallèles. D'un côté, on perçoit bien la colère. Elle est là. On le sait. De l'autre, on imagine cette réalité alternative où l'on ne serait pas en colère. Or, le fait d'entretenir mentalement une réalité parallèle à laquelle on se compare scinde l'esprit en deux. On n'est pas complètement ici. On n'est pas non plus dans le fantasme – puisque c'est un fantasme. Et on organise entre ces deux réalités un combat. On veut que le fantasme triomphe.

Comprendre qu'il n'y a qu'une réalité, c'est comprendre qu'il n'y a vraiment qu'un fil. Qu'on ne saute pas d'un mode à l'autre. Qu'il s'agit d'une seule réalité qui se transforme.

Donc pour transcender la colère, il faut l'embrasser. Puisque dans l'instant, c'est la seule chose qui existe.

La seule chance de transformer ce qui est, c'est en l'acceptant. En le prenant sincèrement en compte. En le vivant pleinement. En ne dépensant aucune énergie mentale sur une réalité alternative. Tout le temps passé dans le fantasme est perdu. Tout le temps passé à ne pas prendre en compte "ce qui est" ne fait qu'entretenir la confusion. Faire s'affronter deux idées ne fait que renforcer les deux participants : la colère devient plus présente ; le fantasme devient plus réel. Et à chaque nouveau round, les deux mondes se dissocient un peu plus.

Je dirais même que cette acceptation est pour moi l'essence de la méditation. (En ce moment en tous cas, parce que ça change tous les six mois.)

Comprenne qui pourra.

La deuxième chose est la continuation de la première :

La vérité se trouve dans le présent. Et uniquement dans le présent.

Or, la pensée construite ne sait pas vivre dans le présent.

Ça, c'est quelque chose que j'avais compris il y a plusieurs années. En observant ma pensée, je m'étais effectivement rendu compte que ce n'était rien d'autre qu'une machine a créer des problèmes. Et là, il faut être très clair : je ne suis pas en train de dire que c'est un effet pervers de la pensée. Je suis en train de dire que c'est la nature de la pensée. C'est sa raison d'existence. Elle ne sert à rien d'autre. L'objectif de la pensée construite est d'imaginer les problèmes potentiels qui pourraient survenir.

Attention : je ne dis pas que ce n'est pas utile ! C'est très utile. Et très intéressant.

Mais si vous ne savez pas l'éteindre, c'est une machine qui gâche la vie. Elle trouve des problèmes partout, tout le temps. Et on ne peut pas lui en vouloir : c'est à ça qu'elle sert. D'ailleurs, on ne peut pas l'éteindre. On peut simplement choisir de l'ignorer de temps en temps. Je la compare souvent à une télévision qui resterait allumée en permanence : ça ne devient un problème que lorsqu'on est convaincu qu'elle dit la vérité.

Mais donc, ce que j'ai compris en lisant Osho, c'est le lien avec le présent : la pensée construite ne sait pas vivre dans le présent.

Parce que si vous y réfléchissez, il faut toujours plusieurs éléments pour créer un problème.

Pour être envieux, pas exemple, il faut au moins trois éléments : un objet d'envie, le souvenir qu'on ne le possède pas, et la croyance qu'on sera mieux avec. Ces trois élément ne peuvent jamais coexister dans le présent – pas en même temps – puisqu'on ne peut tenir dans la conscience qu'un objet à la fois. Soit on admire l'objet mais on oublie (ie : on n'est pas conscient) qu'on ne le possède pas. Soit on se souvient qu'on ne le possède pas mais on oublie sa beauté. Soit on imagine le futur radieux où on le possèdera mais, à l'instant où l'on crée cette image, les véritables fondements de cette joie ne sont plus présents. Pour créer l'envie, il faut que ces trois éléments (au minimum) se succèdent à toute vitesse et à répétition. C'est ce mouvement qui crée l'envie.

Donc pour vivre, pour créer des désirs et des problèmes, la pensée construite a besoin des concepts de passé et de futur. Elle a besoin de créer un mouvement entre ce qui est, ce dont on se souvient et et ce qu'on espère. Un mouvement perpétuel entre le présent et le fantasme.

Au quotidien, j'essaie de me poser régulièrement la question : suis-je en train d'essayer de remplacer une "pensée A" par une "pensée B" ? C'est beaucoup plus pernicieux qu'on pense.

Parce que souvent, la "pensée B" n'a pas du tout l'air d'une pensée. Elle ressemble à une solution. Elle ressemble à la réalité. Elle ressemble à un objectif. Et il faut vraiment faire un effort de présence pour comprendre que non : ce n'est qu'une pensée de plus. Je le résume souvent comme ça à mes amis (j'en ai déjà parlé ici) :

La réalité est faite des pensées dont vous n'arrivez pas à vous débarrasser.

Maintenant que personne n'a rien compris, je vais m'arrêter là. Il faut que j'y aille.

Bisou.

Pour ceux que ça amuse

Train Trouville -> Paris, 18h30

S’est passé quelque chose de drôle tout à l’heure (hier pour vous).

Parmi les commentaires facebook sur le texte d’hier, il y en avait un qui n’était pas content.

«Ah c’était ça, cette odeur… Désolé mec mais ta colère pue l’eau de la Seine.»

D’abord, j’étais assez flatté qu’il reprenne la métaphore scatophile du post original. Ça voulait dire qu’il avait compris. Après, clairement, ça ne lui avait pas plu. J’ai répondu un petit « Yeah! » pour être poli. Mais il a insisté, comme si ce n’était pas clair la première fois :

«Pas une colère saine, quoi (smiley clin d’œil)»

Et c’est exactement du genre de petites conneries dont je vais parler ici.

Non pas de la personne elle-même, ni vraiment de son post, mais de mon propre rapport aux critiques et au monde extérieur.

La vérité, c’est que ma première réaction a été « Oh mon dieu qu’est-ce que j’ai fait ? ».

Un peu comme quand j’avais fait une blague inoffensive en cours de Philo en terminale et que le prof était entré dans une colère noire qui avait duré un quart d’heure. (J’exagère peut-être un peu.) Pendant toute la tempête, je me sentais responsable. C’était ma faute et je m’en voulais.

Dès que quelqu’un réagit de façon un peu abrupte à quelque chose que je fais, le petit enfant en moi se claque les deux joues (Home Alone style) en disant « Ouh là là qu’est-ce que j’ai fait ? ».

Pas uniquement pour les trucs que je poste. C’est souvent, pour tout. À tel point que j’avais écrit cette note dans mon carnet il y a longtemps :

Le premier réflexe, c’est de penser que c’est ma faute.

Donc après, il faut remonter la pente. Est-ce que j’ai vraiment fait quelque chose de mal ? Est-ce que la personne a vraiment pu être vexée /  heurtée par ce que j’ai écrit ? Etc.

Ce qui est parfaitement débile, en soi. Mais c’est ça qui est rigolo : je ne choisis pas. C’est ma réaction naturelle et après, je dois faire l’effort intellectuel de me dire « tu n’as rien fait, tout va bien. »

(Dans le cas du prof de philo, tout le monde était d’accord que je n’y étais pour rien. Il était fou et était connu pour ses colère homériques qui ne partaient de rien.)

Soyons clair : ce commentateur n’a rien fait de mal non plus. Au contraire : il a lu mon truc, il a eu une réaction, il a pris le temps de répondre. Il a interagi. En son nom propre. De façon sincère.

Mais… je ne savais pas quoi répondre. Mon premier réflexe aurait été de m’excuser : « Oh, c’était plus une blague ». Mais en réalité, ce n’était PAS une blague. C’était une façon un peu truculente d’exprimer ce que je pensais à ce moment-là. Je ne vais pas (ne DOIS pas) m’excuser pour ça.

Comme un acteur qui devrait tout à coup justifier le comportement de son personage sur scène :

- Comment avez-vous osé tuer Mercutio ??? Il était si gentil !
- (se démaquillant) Hein ? Tuer qui ? Quoi ?

Après, j’aurais pu engager sincèrement la conversation. J’aurais pu.

Mais je me suis rendu compte en temps réel que je n’en avais pas envie. Ça ne m’intéressait pas.

Ce qui est un peu con, non ? Un peu prétentieux ? C’est la question que je me suis posée.

Finalement, facebook, comme tous les réseaux, c’est un peu un bistrot. Les gens viennent, lancent des trucs à la cantonade, comme ça, et les autres réagissent. C’est ça, le jeu, non ? Alors ne pas réagir à quelqu’un qui a pris le temps de vous lire et qui répond, c’est comme ignorer quelqu’un qui vous parle au comptoir. C’est un peu malpoli. C’est pas très gentil.

En y réfléchissant un peu (je suis dans le train sans trop de réseau, ce qui est toujours une excuse supplémentaire pour rien foutre), j’en suis venu à la conclusion suivante concernant ce que je produis :

Ça m’amuse d’en parler avec les gens que ça amuse. Ça m’emmerde de convaincre les gens que ça emmerde.

(J’aurais aimé placer cette phrase dans un cadre avec des fleurs, des cœurs et des notes de musique mais j’ai vraiment autre chose à foutre.)

Il y a 1000 raisons pour lesquelles il a pu trouver ça puant. Et 745 sont sûrement vraies. Mais… ça ne m’intéresse pas d’en discuter, je crois. Je n’ai pas fait ça pour ça. Si ce que je fais vous énerve, ou si vous trouvez ça puant, ou si ça ne vous plaît pas…

Ce n’est pas pour vous.

Avançons.

Et à la fois, j’espère qu’il n’a pas été vexé de mon refus d’engager plus avant. Si VRAIMENT c’est important pour lui qu’on en parle, oui, bien sûr, on peut en parler.

C’est une question que je me pose très souvent sur facebook. Quand je lis des trucs qui me semblent absolument déments, crétins, hors de propos, scandaleux (et là je ne parle pas de son commentaire, je parle de ce que LUI a dû ressentir en lisant mon post) : est-ce que je réponds ? Est-ce que je commente ? Et 99 fois sur 100 : non. Je ne vois pas ce que je pourrais apporter.

Mon pote Jérôme, lui, répond toujours. (Un peu moins maintenant.) « Mais si, qu’il me disait, il faut contrer la bêtise ! Il faut aider la vérité à triompher ! On ne peut pas laisser les sottises ne pas être challengées ! »

Je lui avais répondu que ceux qui croyaient vraiment ces conneries avaient davantage besoin de prendre un café avec un ami plutôt que d’avoir un nouvel échange en ligne.

Souvent, j’ai l’impression que certains posts facebook sont des appels au secours. Des gens qui ont besoin qu’on s’intéresse à eux et si on n’est pas capable de leur dire « qu’est-ce que tu fais demain, on prend un café ? », ça ne sert à rien de commenter. Ou alors pour la galerie. Comme les gens qui se filment en train d’apporter à manger à des SDF pour instagram.

Le plus important, c’est de ne pas se laisser abattre. Comme j’ai l’impression de l’avoir fait tant de fois. Quand je regarde mon parcours, je suis choqué de voir à quel point je suis influençable. À quel point j’ai pu mettre certains projets de côté simplement parce qu’une critique m’était restée dans l’oreille. Parfois inconsciemment.

Alors que maintenant, ni une ni deux : je chie dans la Seine.

Premier jour

Deauville, 11H45

Je commence aujourd'hui quelque chose qui va durer exactement deux jours, et encore.

L'idée est la suivante : j'en ai marre de mettre des années à pondre des scénarios, des romans et des films de merde qui ne servent à rien. Alors que finalement, je peux faire du caca maintenant. En direct.

Je le fais depuis des années. Chaque matin, je ponds environ 1000 mots dans mon journal et je vous assure que ça n'a aucun intérêt. Inutile de se concenter pendant des années. Donc je me dis : et si je publiais mon journal ?

C'est une très mauvaise idée, bien sûr.

Le journal est très personnel. Je parle de comment et pourquoi j'ai mal dormi, des fulgurances que j'ai eues pendant la méditation, de si la douleur que j'ai derrière la tête est une tumeur, tout ça. Donc rien qui ne peut intéresser personne à part moi.

Et en même temps, vous aussi, vous dormez, vous aussi vous avez des fulgurances et vous aussi, vous allez mourir.

Et c'est aussi l'idée que ce n'est pas à moi de juger ce qui plait ou non. Plein de fois, j'ai fait des trucs dont j'étais persuadé que ça allait tout déchirer et en fait... oui, ça a tout déchiré. Je ne me trompe jamais là-dessus et je suis millionnaire AH AH AH !

Non, sans déconner : une diarrhée. C'est ça que je propose. Et au lieu de la mettre dans les toilettes – ce que tout le monde fait et que je trouve très banal – je propose de la mettre directement sur internet – ce que tout le monde fait aussi et qui est très banal alors pourquoi pas moi.

D'où ce nouveau format :

Nicolas Boulenger invente "Le Flot".

Je sais que le mot existe déjà, et l'idée aussi. Mais là c'est "Le Flot par Nicolas Boulenger".

Chaque jour du reste de ma vie (dans la limite probable de deux jours), je vais écrire des choses en direct que je vais publier sans passer trop de temps à me demander si c'est une bonne idée ou pas. Peut-être qu'il ne faut pas que j'utilise de vrais noms quand même pour protéger l'identité de... [NAME REDACTED] QUEL GROS CON. Là je plaisante. J'ai pris quelqu'un qui trouvera ça drôle et qui ne se vexera pas. J'espère. Sinon c'est vraiment un gros con. Mais on l'a toujours su, non ?

Parce que j'ai toujours eu ce problème : à la fois c'est un site un peu "pro" et je veux que les gens qui ne me connaissent pas et qui arrivent tombent sur des trucs "pro". Genre un film, une sélection en festival, ce genre de conneries. Et en même temps, j'ai vraiment envie d'un endroit pour juste écrire les conneries qui me passent par la tête.

Et oui, vous allez me dire : "c'est à ça que servent les réseaux sociaux !". Mais... non. C'est trop trop banal pour le coup. C'est déjà trop saturé de conneries. Et il y a [NAME REDACTED].

Donc je crée un truc séparé. Quand les gens arrivent sur mon site, ils arrivent sur le "Blog", qui est un peu la version "Petite Maison dans la Prairie" de ma vie. Gna gna gna. Oui oui, je suis très créatif, gna gna gna. Oui, je poste une belle photo d'un décor de film que j'ai fait gna gna gna. Oh, regardez, encore une citation de David Bowie sur la création gna gna gna.

Et puis pour ceux qui cliquent dans "flot", c'est le reste.

C'est la cabane où j'ai caché tous les cadavres. C'est ce que je ne devrais pas dire, ce que vous ne devriez pas savoir mais fuck, on ne vit qu'une fois et finalement, en vrai, tout le monde s'en fout.

Je me demande si je commence ça parce que j'ai fini mon roman. J'ai récemment fini un roman que j'écris depuis 15 ans et... PUTAIN, 15 ANS. Est-ce que j'aurais pas pu aller un tout petit peu plus vite bordel de merde ? Bon, il fait 800 pages et... Non, je déconne. Il fait à peine 100 pages. Soit entre 6 et 7 pages par an !! Et tout ça pour quoi ?

Oui oui, je vais l'envoyer à des éditeurs. Mais c'est sûrement ce doute qui m'habite : et s'il est pris nulle part ? Et si tout le monde s'en fout (qui a crié "à juste titre ? [NAME REDACTED], c'est toi ?") ? Parce que le vrai problème c'est que, même si je n'ai pas fait que ça (dieu merci), je suis sûr que ça a occupé une partie de mon espace mental. Une partie de mon cerveau se disait "ça, c'est en cours, donc on ne commence rien d'autre d'important". Et je vous assure que j'ai rigoureusement écouté cette partie de mon cerveau et absolument RIEN fait d'important au cours des 15 dernières années ! À part mon fils. Mais c'est tout.

Donc j'en ai marre de toutes ces conneries. On va faire comme Staline : si la qualité ne marche pas, on va innoner les gens sous la quantité. Il n'y a que ça de vrai. Regardez tous les milliardaires ! Vous pensez que Bernard Arnault s'est enrichi en créant UNE bouteille de parfum PARFAITE ? NON ! Il est a chié des centaines de millions achetées par tous les abrutis de la planète ! La quantité ! La quantité ! Inonder le monde ! Les gens n'ont rien à foutre de ce que je fais ?? TRÈS BIEN ! On va les NOYER DEDANS ! Hanouna style ! Tous les jours, toutes les heures !

Bref voilà où j'en suis.

Et là j'en ai marre d'écrire alors j'arrête. Parce que ça va être comme ça maintenant. Je suis un putain de dictateur. Je choisis quand ça commence et quand ça s'arrête. D'un claquement de doigt, j'arrête la course des astres. Je ferme les yeux et vous n'existez plus. (Les deux dernières phrases sont tirées d'un autre roman que j'ai jamais terminé donc je recycle.)

Bisou.

Je vais au sport parce que pour l'instant, à part bouffer deux pains au chocolat et écrire cette bouse, j'ai rien fait de la matinée. OUI, j'ai plein d'excuses que je vous expliquerai un autre jour mais même pas.

Et pour être clair : j'ai pondu cette bouse en MOINS DE QUINZE MINUTES. Et je déconne même pas. Je suis remonté. Alors que l'autre roman de merde a pris quinze ans et que je vous assure qu'il est BEAUCOUP BEAUCOUP moins drôle.