Deux films sur le féminisme et le passage à l'age adulte dont les premières trente minutes m'ont fait me demander : "Ils ne comptent pas faire un film entier avec ça ?".
Pour Barbie, la réponse était "malheureusement, si".
Comme pour Edmond, c'est un film dont j'aurais aimé partager l'amour avec le reste du monde. J'étais prêt à rire et à être conquis mais... patatras. Le film se résume à une longue succession de clins d'oeil que les auteurs adressent au public pour dire "vous avez vu comme on a retourné ça ? C'est malin, hein ?". Oui oui, c'est malin. Mais après dix clins d'oeil, quand on réalise qu'il n'y a pas d'histoire à proprement parler, que les enjeux liés au féminisme ou à Mattel sont de l'habillage et que les personnages sont des coquilles vides... on se sent floué. Comme un long sketch SNL qui aurait mal tourné. J'ai eu du mal à arriver au bout et la fin n'a pas récompensé mon effort.
Poor Things, de Yórgos Lánthimos, est différent.
Les personnages, l'atmosphère et l'humour sont étranges, inattendus et, là encore, j'ai eu peur que le film ne se complaise dans cette étrangeté au point d'y rester bloqué. Mais pas du tout : rapidement, le film avance ; les personnages évoluent ; l'histoire suit son cours avec des choix forts. C'est un mélange entre un conte de fées et un conte philosophique dont les retournements peuvent sembler loin de nos préoccupations – tous ces gens sont beaucoup plus beaux ou beaucoup plus laids que nous, souvent avec des personnalités très caricaturales, au moins au départ – mais qui finit par poser des questions très proches des nôtres : à quel point suis-je la prolongation de mes parents ? Suis-je trop conditionné par la société pour être moi-même ? Comment atteindre une forme de liberté et de plénitude dans un monde imparfait ?
Comme dans tout bon conte, on ne comprend pas nécessairement chaque allusion – tout n'est pas explicité pour une fois, merci – mais on sent que ça parle de nous et on en sort un peu transformé. N'est-ce pas ça, le cinéma ?