Dans la série "tout le monde était au courant sauf moi", sous-catégorie "jolie chanson sur les oiseaux mais en fait pas du tout", je voudrais l'Aigle noir de Barbara, qui parle en réalité de l'inceste qu'elle a vécu enfant.
Une amie m'a dit ça en passant alors je suis allé vérifier.
Les paroles prennent une toute autre signification.
Un clip que j'adore tourné par Camille Tardieu en une seule prise pendant le festival Off Courts cette année :
Le musicien est Édouard Pons (qui a fait la musique de mon film Migrul, également tourné à Off Courts cette année). Et le clip est réalisé et animé par Camille Tardieu qui fait des trucs formidables.
J'ai des choses à faire ("quoi"), comme tout le monde, mais je n'ai aucune idée de comment je vais m'y prendre.
Et je crois que c'est ça, le secret.
Les obligations sont comme des contrats passés avec le monde extérieur : on s'engage sur un résultat.
Mais on est entièrement libre sur la manière et la forme.
Donc chaque matin, je fais un état des lieux. Quelles émotions sont présentes ? Quelles envies ? Quel temps fait-il dehors ? Que nous dit cette journée ? Quelles occurrences se manifestent spontanément ?
On repère ces ingrédients disparates puis on invente une recette qui n'existait pas la veille.
L'ignorance est clé dans ce processus.
Sans plan pré-établi, on est bien obligé d'ouvrir les yeux, d'improviser, de danser avec ce qui survient.
Sinon, pourquoi se lever ?
"Si on sait exactement ce qu'on va faire, à quoi bon le faire ?" – Pablo Picasso
Ce qui est agréable : ce sont mes vidéos les plus sincères qui marchent le mieux, celles où j'ai exprimé des idées qui me parlent réellement. Je dois commencer à trouver "mes pairs".
Évidemment, c'est sur Instagram. Donc c'est mal. Je commence à réfléchir à des alternatives.
À peu près le même sujet que le podcast précédent, avec un focus particulier sur les fusions-acquisitions qui donnent naissance à des géants devenant des monopoles de fait.
Quelques idées nouvelles qui m'ont marqué :
The "chickenization" ("pouletisation") qui décrit l'intégration horizontale et verticale de certaines industries, sur le modèle des éleveurs de poulets : le grand groupe agroalimentaire leur dit quelle espèce élever, comment les nourrir, comment organiser l'espace, à quelle heure allumer et éteindre les lumières... Les éleveurs n'ont aucun pouvoir. Sans le savoir, ils peuvent faire partie d'une "expérience" : du jour au lendemain, les poulets meurent. Pour l'éleveur, c'est une tragédie ; pour le groupe, un point de données supplémentaire pour gagner davantage de contrôle.
Quand les acheteurs se consolident pour former des grands groupes, les vendeurs n'ont pas d'autres choix que de faire la même chose pour lutter, créant d'autant moins de choix pour le consommateur final.
Amazon a perdu 100 millions de dollars en un mois en donnant gratuitement des couches pour bébé... afin de couler un concurrent qui s'était lancé dans la livraison de couches. Une mise en garde à tous les entrepreneurs.
Le droit d'auteur individuel des artistes ne permet pas de les protéger contre les grands groupes avec lesquels la négociation est trop déséquilibrée. Les droits collectifs semblent une meilleure voie.
Microsoft a beau avoir gagné le procès antitrust de 2001, la déposition de Bill Gates a été dévastatrice pour lui et pour sa société. La punition, c'est le processus, pas le résultat. Pour cette raison, la majorité des grands groupes préfèrent négocier. Malgré ça, il est nécessaire de trouver des solutions plus immédiates que les procès qui prennent parfois des décennies.
Le fait qu'il n'y ait pas de carte ne veut pas dire qu'il n'y a pas de chemin. Il faut parfois naviguer à vue pour découvrir les ouvertures : c'est la fondation de l'espoir.
Ce type, Cory Doctorow, ancien auteur de science fiction devenu activiste, est passionnant. Je vais le suivre de plus près.
C'est une courte note sur mon téléphone que je lis tous les matins.
Elle contient :
Ce que je fais chaque jour si possible (méditation, mini-sport, vidéo quotidienne, post pour ChezFilms) avec un conseil ou une idée forte si nécessaire.
De grandes directions à long terme : idées à mettre en place régulièrement concernant la présence, la vie sociale, la créativité.
Quelques idées et pense-bêtes à court terme, pour le travail ou les projets en cours par exemple.
Il est inutile d'accumuler des notes si elles ne sont pas utilisées. En cela, la note "Aujourd'hui" est une façon de communiquer avec moi-même : j'y garde tout ce qui me semble important et que je ne veux pas me laisser oublier.
C'est une note très courte et vivante que je mets à jour régulièrement : ce qui reste a été poli par de multiples lectures/réécritures et est donc en général très fort et très clair. De nouvelles idées sont ajoutées de temps en temps – qui passent le test du temps ou non.
Ça m'est arrivé la première fois la veille du confinement.
Je méditais depuis deux ans et le matin, presque sans faire exprès, j'ai arrêté la voix dans ma tête.
Plus de blabla intérieur, plus de jugement permanent, plus de rumination anxieuse. Le silence.
J'étais stupéfait.
Ça m'était sûrement déjà arrivé avant mais c'était la première fois que je le remarquais – et que ça durait. Je pouvais maintenir ce silence.
J'ai passé la journée à errer dans les rues, explorant cette nouvelle expérience.
Il est donc possible d'interagir avec le monde sans petite voix qui juge tout ? Il est possible de regarder un objet sans entendre "j'aime ou j'aime pas" ? De choisir la prochaine direction sans délibération verbale ? De prendre une décision sans le couperet d'un jugement intérieur ?
J'ai fini par comprendre que la pensée verbale n'était pas la source de l'action. Ce n'est pas elle qui "réfléchit à haute voix (dans la tête) pour prendre une décision". Les décisions sont prises ailleurs. Elle ne fait que commenter.
Et il est parfaitement possible (souhaitable ?) de vivre et d'agir sans ce commentaire.
Cory Doctorow dans le podcast d'Adam Covener sur la medification.
Cory Doctorow a inventé le terme "Enshittification".
Dans le podcast d'Adam Conover, je pensais qu'il allait faire un bref état des lieux, un peu de pub pour son bouquin éponyme, deux ou trois blagues, et puis voilà.
Ce que j'ai découvert : un des discours les plus riches et les plus pertinents sur la technologie, la propriété intellectuelle et le monde moderne que j'ai entendu depuis longtemps.
Cory nous explique que le processus de merdification se fait en cinq étapes :
Produire un super produit pour attirer les clients.
Les "ferrer" ("lock them in") en rendant le départ compliqué ou coûteux.
Dégrader l'expérience utilisateur pour la rendre plus attirante pour les entreprises.
Ferrer les entreprises à leur tour par manque d'alternative.
Dégrader l'expérience pour tous afin de garder le surplus.
À l'instar des banques ("too big to fail"), les grandes plateformes puisent leur pouvoir de la difficulté de leurs utilisateurs à partir ("too big to care").
Ce qui leur donne liberté entière pour transformer – et au final dégrader – l'expérience client à leur profit exclusif. 3 exemples :
Google a volontairement dégradé la pertinence de son moteur de recherche pour multiplier les impressions publicitaires (+ de recherches pour trouver un résultat = + de pub)
En Finlande, les prix affichés par les étiquettes électroniques dans les supermarchés changent environ 2000 fois par jour pour ne jamais perdre la marge ajustée.
Aux USA, la plupart des infirmières sont des freelance qui passent par une plateforme pour être engagées. L'application a accès à leur "credit score" ce qui permet aux hôpitaux de proposer des salaires moindres aux infirmières en difficulté.
Dans ce processus, une app est, selon Cory, un "site web empaqueté dans de la propriété intellectuelle" : la loi interdit formellement de customiser, étendre ou adapter une application, sous peine de lourdes sanctions.
Donc l'utilisateur n'a aucune arme pour se défendre et "dé-merdifier" son expérience. Il est prisonnier.
"Imaginez que la personne qui a fabriqué votre maison soit la seule à pouvoir la réparer."
Des solutions ?
Les efforts de l'UE pour encadrer la technologie (notamment concernant l'interopérabilité) sont une bonne piste, dit-il. Mais la fameuse "Euro Stack" censée remplacer les GAFAM ne sera utile qu'avec les bons outils de migration permettant aux administrations de ne pas repartir de zéro – impossibles à concevoir sans reverse engineering.
Au final, il estime que les grandes entreprises sont obsédées par les IP (intellectual properties) dans l'illusion qu'elles leur permettraient de s'affranchir du facteur humain, moins contrôlable. Mais :
"La recette pour fabriquer quelque chose est beaucoup moins importante que la connaissance nécessaire pour la suivre."